Boulimie sous haute tension
Endocrinologie et métabolisme Neurologie
Le trouble d’hyperphagie boulimique (BED) est un trouble du comportement alimentaire caractérisé par des épisodes répétés d’ingestion excessive d’aliments en peu de temps. Associé à une perte de contrôle, ce trouble ne comprend pas de comportements compensatoires (vomissements, restriction, etc.). Il s’agit de la forme de trouble alimentaire la plus fréquente dans la population générale, touchant particulièrement les personnes souffrant d’obésité. Le BED est souvent accompagné d’une souffrance psychologique importante, ainsi que de comorbidités psychiatriques telles que l’anxiété, la dépression ou encore des troubles métaboliques.
Les stratégies thérapeutiques actuelles, basées principalement sur la psychothérapie ou sur certaines approches pharmacologiques, montrent des résultats partiels. En pratique, moins de la moitié des patients obtiennent une abstinence complète des crises à moyen terme. Ces traitements sont également limités par des effets secondaires, une variabilité individuelle dans la réponse, et l’absence de biomarqueurs prédictifs de succès thérapeutique.
L’un des principaux défis dans la prise en charge du BED réside dans la régulation du contrôle inhibiteur, souvent altéré chez ces patients, et dans la gestion du craving alimentaire, fortement associé aux mécanismes neuronaux de la récompense, similaires à ceux observés dans les troubles addictifs. Cette proximité neurobiologique avec les addictions a ouvert la voie à l’exploration de techniques de neuromodulation, comme la stimulation magnétique transcrânienne répétée (rTMS).
Dans ce contexte, cette étude a été conçue pour évaluer les effets de la rTMS appliquée au cortex préfrontal dorsolatéral gauche (dlPFC), une région clé dans le contrôle des impulsions et la régulation du craving. L’objectif était de déterminer si une stimulation non invasive pouvait réduire la fréquence des épisodes d’hyperphagie chez des femmes obèses atteintes de BED. Un second objectif consistait à évaluer les effets secondaires, la tolérabilité du traitement, ainsi que son influence sur le craving, l’humeur et les troubles psychologiques associés.
Stimuler le cerveau, calmer l’appétit ?
Cet essai contrôlé randomisé en double aveugle avait pour objectif d’évaluer les effets de 20 sessions de rTMS neuronaviguée à 10 Hz appliquées au cortex préfrontal dorsolatéral gauche. Le critère principal de l’étude portait sur la diminution du nombre d’épisodes d’hyperphagie. Les chercheurs ont également évalué l’intensité du craving alimentaire, ainsi que plusieurs indicateurs secondaires. Parmi eux figuraient l’indice de masse corporelle (IMC), les niveaux d’anxiété et de dépression, et les troubles spécifiques du comportement alimentaire. Un suivi a été réalisé jusqu’à 16 semaines après la répartition des participantes dans les groupes d’intervention.
L’étude a porté sur 59 femmes obèses diagnostiquées BED. Les résultats montrent que le rTMS actif a significativement réduit la fréquence des épisodes boulimiques, par rapport au groupe sham, à la fois à la fin du traitement et au suivi à 8 semaines. En revanche, aucune différence significative n’a été observée entre les groupes concernant le craving, l’évolution de l’IMC ou les scores psychopathologiques. Le traitement a été globalement bien toléré, avec seulement quelques céphalées modérées rapportées. L’aveuglement a été maintenu de manière satisfaisante, avec seulement 16 % des participantes ayant correctement deviné leur groupe d’affectation.
Une impulsion pour sortir du cycle boulimique
Le trouble d’hyperphagie boulimique est une pathologie fréquente et invalidante, marquée par des prises alimentaires incontrôlées et récurrentes, souvent associées à une détresse psychologique et à l’obésité. Malgré des traitements disponibles, les résultats cliniques restent modestes, avec un taux de rémission partielle fréquent, en particulier chez les patientes présentant des troubles du contrôle inhibiteur.
L’un des principaux défis thérapeutiques réside dans l’incapacité des approches conventionnelles à corriger durablement la compulsivité alimentaire et à prévenir les rechutes. Dans cette optique, la stimulation magnétique transcrânienne répétée, appliquée au cortex préfrontal dorsolatéral gauche, a été proposée comme cible prometteuse, en raison de son rôle dans la régulation des impulsions et de la prise de décision.
Les résultats de cet essai montrent que la rTMS active diminue significativement la fréquence des épisodes d’hyperphagie, sans affecter de manière significative l’intensité du craving ou l’indice de masse corporelle. Cela suggère que la stimulation du dlPFC pourrait renforcer le contrôle comportemental, plutôt qu’agir directement sur la motivation alimentaire. L'effet observé semble donc spécifique à la réduction des comportements impulsifs, confirmant la pertinence de cette région comme cible de neuromodulation dans les troubles de la maîtrise de soi.
Cependant, certaines limites méthodologiques subsistent et justifient la poursuite de nouvelles recherches pour valider et étendre ces observations. Des études de plus grande ampleur, avec un suivi prolongé, des mesures neurocognitives et biologiques complémentaires, ainsi que des populations plus diversifiées sont en effet nécessaires. L’intégration de la rTMS à des interventions cognitivo-comportementales pourrait offrir des stratégies de traitement combinées et personnalisées, plus efficaces pour rompre durablement le cycle de la boulimie.

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