08/07/2025
Virus & Fertilité : Quand la barrière cède-t-elle ?
Infectiologie
Longtemps considérés comme un sanctuaire immunitaire, les testicules se révèlent être une cible silencieuse mais privilégiée de plusieurs virus émergents, parmi lesquels le Zika, le VIH, les virus Ebola et Marburg, ou encore le virus des oreillons. Des données récentes montrent que ces infections virales peuvent avoir des conséquences cliniques majeures, allant de troubles de la fertilité à une inflammation testiculaire chronique, voire à une transmission sexuelle prolongée du virus.
Malgré ces enjeux, les traitements actuels se limitent à la gestion systémique de l’infection, sans cibler spécifiquement la barrière hémato-testiculaire (BHT), pourtant véritable rempart du tissu germinal. Or, cette structure complexe constitue la première ligne de défense contre l’invasion virale du compartiment testiculaire.
Les défis à relever sont nombreux : il s’agit de mieux comprendre les mécanismes de rupture de cette barrière, d’identifier les acteurs cellulaires impliqués, et de pallier le manque de modèles précliniques fiables pour reproduire ces processus.
Dans ce contexte, cette revue propose d’explorer comment certains virus parviennent à perturber la BHT, étape clé et souvent invisible de l’infection testiculaire.
Barrière HS, virus OK ?
Des modèles expérimentaux humains, murins et simiens ont été mobilisés, dans le but d’explorer les mécanismes d’invasion du tissu testiculaire par différents virus à tropisme confirmé. L’analyse s’est concentrée sur les modifications structurelles et fonctionnelles de la BHT, en particulier sur les altérations des protéines de jonction clés telles que les claudines, l’occludine et ZO-1. L’étude examine également les interactions entre ces agents pathogènes et les cellules de Sertoli — essentielles au maintien de l’intégrité de la BHT — ainsi que le rôle des macrophages testiculaires dans la modulation locale de la perméabilité et la réponse immunitaire.
L’étude montre que les virus Zika, VIH, Ebola, Mumps et Marburg sont capables de franchir la BHT après l’avoir affaiblie par l’induction de cytokines pro-inflammatoires comme le TNF-α, l’IL-6 ou l’IFN-γ. Les cellules de Sertoli sont particulièrement ciblées, ce qui entraîne une désorganisation des jonctions serrées, en particulier celles impliquant ZO-1 et l’occludine. Le VIH se distingue en produisant la protéine Tat, qui module la transcription des gènes codant pour ces protéines de jonction, contribuant ainsi à l’ouverture de la barrière.
Le virus des oreillons, déjà bien documenté pour son implication dans les orchites, induit des cascades inflammatoires qui fragilisent mécaniquement la BHT. Concernant le Zika, plusieurs études ont mis en évidence une persistance virale dans les testicules et le sperme pendant plusieurs mois, malgré une réponse immunitaire locale. Enfin, les infections expérimentales chez les primates non humains par les virus Ebola et Marburg confirment la présence virale dans les cellules de Sertoli, accompagnée d’une altération majeure des protéines jonctionnelles, témoignant d’un franchissement effectif de la BHT.
La faille dans l’armure
Certains virus présentent un tropisme prononcé pour les testicules, avec des conséquences cliniques majeures telles que des troubles de la fertilité et une transmission sexuelle prolongée. L’un des enjeux majeurs réside dans la compréhension des mécanismes à l’origine de la rupture de la BHT, une étape déterminante mais encore largement méconnue, qui conditionne l’invasion du tissu germinal par les agents pathogènes.
Cette revue avait pour objectif d’éclairer les processus par lesquels certains virus parviennent à perturber la BHT et à franchir ce rempart, permettant ainsi leur persistance dans le compartiment testiculaire.
Les résultats montrent que l’intégrité de la BHT peut être altérée sous l’effet de cytokines pro-inflammatoires ou de protéines virales spécifiques, transformant cette barrière en point d’entrée vulnérable. Les cellules de Sertoli, essentielles à la stabilité de cette frontière immunologique, apparaissent comme des cibles privilégiées de l’agression virale.
Plusieurs perspectives se dégagent de ces travaux : la mise au point de traitements capables de restaurer la BHT, le développement de modèles ex vivo adaptés au tissu testiculaire, une vigilance accrue face aux virus émergents susceptibles de cibler les testicules, et l’intégration systématique de la dimension reproductive dans les politiques de gestion des épidémies virales.
Source(s) :
Hager-Soto, E. E., et al. (2025). Viral Disruption of Blood-Testis Barrier Precedes Testicular Infection. Viruses, 17(6), 747 ;

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