Comment les nouvelles thérapies transforment-elles la prise en charge du cancer de la prostate résistant à la castration métastatique ?
Oncologie
Le cancer de la prostate métastatique résistant à la
castration (mCRPC) demeure une maladie incurable, malgré une
décennie de progrès thérapeutiques notables. L’objectif clinique ne se limite
plus à la survie, mais intègre désormais la qualité de vie (QoL) et le contrôle
des symptômes. L’hétérogénéité biologique du mCRPC, marquée par une
complexité génomique croissante, appelle à une approche personnalisée reposant
sur des biomarqueurs pour guider les choix thérapeutiques. Cette revue
fait le point sur les traitements actuels, les innovations ciblées et les
enjeux cliniques à venir.
Traitements standards et nouvelles associations ciblées :
Vers une approche guidée par les biomarqueurs
La chimiothérapie reste un pilier : le docétaxel,
standard de première ligne, prolonge la survie (OS médiane : 19,2 mois vs 16,3
mois, p < 0,004). En cas de progression, le cabazitaxel améliore
également l’OS (15,1 vs 12,7 mois) avec des bénéfices sur la douleur et la
réponse PSA. Toutefois, la toxicité hématologique importante limite
parfois leur utilisation.
Les inhibiteurs du récepteur aux androgènes (ARSI)
comme enzalutamide et abiratérone ont démontré leur efficacité en
pré- et post-docétaxel. L’étude PREVAIL a montré une amélioration
significative de la survie (32,4 vs 30,2 mois) et de la PFS radiologique (65 %
à 12 mois). Ces agents sont mieux tolérés, mais exposent à des effets
secondaires tels que fatigue, hypertension ou troubles métaboliques.
Les thérapies ciblées gagnent en importance avec
l’essor de l’oncologie de précision. Environ 20 % des mCRPC
présentent des anomalies de réparation de l’ADN (HRR), notamment les
mutations BRCA1/2, sensibles aux inhibiteurs de PARP (PARPi).
L’essai PROfound a démontré une amélioration de la PFS (7,4 vs 3,6 mois,
HR 0,34) et de l’OS (18,5 vs 15,1 mois) avec olaparib chez les patients
BRCA1/2 ou ATM mutants.
Plusieurs essais (PROpel, MAGNITUDE, TALAPRO-2) ont évalué
des associations PARPi/ARSI. L’étude PROpel, sans sélection
biomoléculaire préalable, a montré une amélioration de la PFS (24,8 vs 16,6
mois) avec olaparib + abiratérone, notamment chez les patients BRCA mutants (HR
0,29). Cependant, la toxicité (anémie, fatigue) reste une limite.
Vers des thérapies plus personnalisées : nouvelles
cibles, immunothérapie et theranostics
La voie PI3K/AKT/mTOR, activée en cas de perte du
gène PTEN (40–60 % des mCRPC), constitue une cible prometteuse. L’essai IPATential150
a montré un bénéfice de la combinaison ipatasertib + abiratérone sur la
PFS chez les patients PTEN- (HR 0,65).
En revanche, l’immunothérapie n’a pas encore démontré
de bénéfice significatif dans cette population. Les essais KEYNOTE-199 et
KEYLYNK-010 ont été négatifs chez les patients non sélectionnés. La faible
expression de PD-L1 et l’environnement tumoral "froid"
expliquent cette résistance.
Les approches theranostiques progressent rapidement
avec le Lutétium-177-PSMA. L’essai VISION a montré une
amélioration de la PFS (8,7 vs 5,1 mois) et de la QoL (FACT-P : 9,7 vs 2,4
mois) avec une tolérance acceptable. L’essai PSMAfore, en situation
pré-taxane, confirme ces résultats (rPFS : 12,0 vs 5,6 mois, HR 0,43).
Vers une séquence thérapeutique guidée par les
biomarqueurs
Le traitement du mCRPC a considérablement évolué avec
l’intégration des PARPi, des inhibiteurs de l’AKT, et du Lutétium-177,
en complément des ARSI et taxanes. Toutefois, le séquençage optimal des
traitements et leur combinaison restent à définir. L’intégration systématique
de tests génomiques (HRR, PTEN, ctDNA) permettra de mieux stratifier
les patients et d’optimiser les résultats cliniques tout en préservant la
QoL.
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