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Plus de 90 % de la population mondiale a été en contact avec le virus Epstein-Barr. La primo-infection peut être à l’origine d’une mononucléose infectieuse dans 13 à 22 % des cas, mais reste asymptomatique le plus souvent. Après la primo-infection, le virus reste latent dans les cellules B, avec des réactivations sporadiques possibles. Le virus Epstein-Barr est également à l’origine de pathologies cancéreuses, provoquant près de 138 000 décès chaque année dans le monde. Les réactivations du virus chez les receveurs de greffes d’organes solides et de cellules souches hématopoïétiques sont associées à des troubles lymphoprolifératifs après la greffe. A ce jour, les scientifiques ne savent pas pourquoi certaines personnes développent une mononucléose infectieuse au moment de la primo-infection et d’autres non, ni pourquoi seule une fraction des patients transplantés présente des troubles lymphoprolifératifs liés à une réactivation du virus.  

La réponse immunitaire déclenchée par l’infection par le virus Epstein-Barr implique des lymphocytes T CD8+ cytotoxiques et des cellules NK (Natural Killer). Dans les réponses à lymphocytes T CD8+, une sous-catégorie de ces cellules se lie au HLA-E, un type HLA très conservé au sein de la population européenne. L’HLA-E pourrait jouer un rôle important dans le contrôle des infections par le virus Epstein-Barr, en modulant les réponses immunitaires. L’HLA-E est en effet un modulateur clé des cellules NK et des lymphocytes T cytotoxiques. Dans une nouvelle étude, des chercheurs se sont fixés comme objectif de déterminer si les réponses immunitaires dépendantes du HLA-E avaient un impact significatif sur le développement et l’évolution de l’infection par le virus Epstein-Barr.  

Cette étude a inclus 1 404 personnes, parmi lesquelles :  

578 ont présenté une mononucléose infectieuse, 
206 avaient une sérologie positive au virus Epstein-Barr, mais n’avaient jamais développé de mononucléose infectieuse, 
- 28 personnes âgées avec des réactivations symptomatiques de l’infection,  
- 180 personnes transplantées avec une réactivation symptomatique de l’infection post-transplantation, dont 36 avec des troubles lymphoprolifératifs. 

Parallèlement, 412 sujets en bonne santé ont été recrutés comme sujets contrôle.  

Les données de l’étude mettent en évidence que le génotype HLA-E*0103/0103 hautement exprimé protège contre la mononucléose infectieuse, en raison de l’induction de puissantes réponses des lymphocytes T CD8+ dépendants du HLA-E et spécifiques du BZLF1 (gène viral précoce immédiat du virus Epstein-Barr), qui empêchent efficacement la dissémination virale in vitro.  

Par ailleurs, les données de l’étude démontrent que le risque de réactivation symptomatique de l’infection par le virus Epstein-Barr chez les personnes immunocompétentes et chez les receveurs de greffe immunodéprimés dépend des variations de l’axe inhibiteur NKG2A (ou CD159, récepteur pour les cellules NK)/LMP-1 (protéine membranaire du virus)/HLA-E. Les données génomiques révèlent que certains variants peptidiques du LMP-1 (GDPHLPTL ou GGDPPLPTL), présentés par HLA-E, provoquent de fortes réponses inhibitrices des cellules NK et des lymphocytes T CD8+. La présence de souches virales codant pour ces deux variants peptidiques était fortement associée à des réactivations symptomatiques de l’infection. De même, la présence de telles souches est associée à une progression vers des troubles lymphoprolifératifs post-transplantation.  

Cette nouvelle étude indique que les réponses immunitaires liées au HLA-E et à l’axe inhibiteur NKG2A/LMP-1/HLA-E peuvent constituer des marqueurs prédictifs de l’évolution de l’infection par le virus Epstein-Barr, à la fois en cas de réactivation chez les personnes immunocompétentes, et en cas de transplantation chez les personnes immunodéprimées. Des études complémentaires sont nécessaires pour évaluer si les variations individuelles des réponses immunitaires liées au HLA-E peuvent constituer des marqueurs prédictifs pour les cancers liés au virus. Enfin, toutes ces données doivent être prises en compte dans le développement d’un futur vaccin capable de protéger efficacement contre l’infection par le virus Epstein-Barr. 




Source(s) :
Source(s) : Hannes Vietzen and al. HLA-E-Restricted Immune Responses Are Crucial for the Control of EBV Infections and the Prevention of PTLD. Blood 2022017650. 2022 Dec 7. ;

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