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25/06/2025

Objectiver, prédire, personnaliser : la révolution IA dans la greffe d’organes

Chirurgie

#IA #Transplantation #MachineLearning #RejetDeGreffe


La transplantation d’organes solides est aujourd’hui le traitement de référence en cas d’insuffisance terminale d’organe. Mais entre la pénurie de greffons, l’évaluation préopératoire complexe et le risque de rejet chronique, les obstacles restent nombreux. C’est dans ce contexte que l’intelligence artificielle (IA), et plus précisément le machine learning (ML), attire l’attention croissante des cliniciens et chercheurs.

Cette revue de littérature explore les dernières avancées de l’IA dans le champ de la transplantation, en s’intéressant à trois axes majeurs : l’évaluation pré-greffe, le diagnostic du rejet et la personnalisation du suivi post-opératoire. À la clé, une promesse : transformer la médecine de greffe en un domaine plus prédictif, plus objectif et plus personnalisé.  


De la segmentation aux scores prédictifs : l’IA avant la greffe


L’évaluation pré-transplantation repose encore souvent sur des examens subjectifs et des jugements d’experts. Pour fiabiliser ces étapes, des modèles d’IA ont été développés. Exemple ? Un algorithme de segmentation automatisée du rein basé sur des données de scanner a montré une précision quasi équivalente à l’expertise humaine (coefficients de Dice à 0,94 pour le cortex).

Côté poumons, un autre algorithme basé sur l’“apprentissage par dictionnaire” a pu prédire avec 85 % d’exactitude la viabilité de greffons pulmonaires selon des images CT. D'autres modèles, comme XGBoost, permettent de prédire la fonction immédiate du greffon rénal (IGF), optimisant ainsi la sélection des receveurs.

Un modèle d’IA fondé sur l’âge électrocardiographique (ECG age) s’avère aussi pertinent pour évaluer la fragilité cardiovasculaire des patients. Plus l’écart avec l’âge chronologique est grand, plus le risque de mortalité est élevé, avec un HR de 3,59 par tranche de 10 ans.

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Diagnostiquer le rejet, objectivement


Le diagnostic histologique reste la pierre angulaire de l’identification du rejet d’un greffon. Pourtant, la complexité des classifications, notamment celle du Banff, génère une variabilité inter-observateurs problématique. Pour y remédier, le Banff Automation System propose un outil d’analyse automatisée intégrant lames, scores lésionnels, et données moléculaires. Résultat ? Une reclassification pertinente de nombreux cas et une meilleure prédiction de la survie du greffon.  

D'autres modèles, tels que ceux du laboratoire Zhang ou le score RejectClass, utilisent l’analyse d’images numériques complètes pour anticiper la perte de greffon. L'approche de Fang et al. via la protéomique a permis de distinguer les rejets à cellules T (TCMR) avec 80 % de précision. La plateforme MMDx, elle, s’appuie sur des profils transcriptomiques pour reclasser les biopsies de greffe rénale et même pulmonaire, avec une corrélation accrue à la survie réelle du greffon.  


Gérer l’immunosuppression : IA au chevet de la pharmacocinétique 


L’ajustement des doses de ciclosporine ou tacrolimus est délicat, nécessitant des dosages fréquents. Des modèles d’IA, comme ceux basés sur les algorithmes évolutionnaires ou les réseaux neuronaux, permettent de prédire ces taux sanguins à partir de données cliniques ou génétiques. L’algorithme XGBoost a même surpassé les méthodes bayésiennes classiques en termes de précision pour l’exposition au tacrolimus.  


Vers une médecine prédictive post-greffe


Comment anticiper les complications et la survie après transplantation ? Des modèles comme le Random Survival Forest (RSF) permettent une stratification précise des receveurs. Dans la greffe pulmonaire, ce modèle a différencié des groupes à faible ou haut risque avec des espérances de vie de 52,9 mois contre 14,8 mois.

Le modèle ReSOLT, développé à partir de la base UNOS, classe les patients greffés du foie en 20 sous-groupes pronostiques, avec une AUC de 0.742. D'autres approches ont ciblé la prédiction du sepsis post-opératoire ou de la fibrose hépatique avec des algorithmes LSTM. Enfin, un modèle d’ensemble learning développé en Éthiopie a atteint une AUC de 0.88 pour prédire l’échec de greffe rénale.  


Une greffe de données réussie ?


Grâce à l’intelligence artificielle, la transplantation d’organes entre dans l’ère de la précision. Pré-greffe, rejet, immunosuppression, pronostic : toutes les étapes sont repensées pour être objectivées, anticipées et personnalisées. Les outils sont puissants, mais encore perfectibles : les biais des bases de données, l’hétérogénéité des pratiques cliniques et les limites de généralisation restent à surmonter.  

Pour autant, ces innovations esquissent une transformation profonde de la médecine de transplantation plus équitable, plus sûre, et résolument tournée vers la médecine de précision.

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Source(s) :
Al Moussawy M, Lakkis ZS, Ansari ZA, Cherukuri AR, Abou-Daya KI. The transformative potential of artificial intelligence in solid organ transplantation. Front. Transplant. 2024;3:1361491 ;

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