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18/11/2025

Comment les nouvelles thérapies transforment-elles la prise en charge du cancer de la prostate résistant à la castration métastatique ?

Oncologie

Par Lila Rouland | Publié le 18 novembre 2025 | 3 min de lecture


Le cancer de la prostate métastatique résistant à la castration (mCRPC) demeure une maladie incurable, malgré une décennie de progrès thérapeutiques notables. L’objectif clinique ne se limite plus à la survie, mais intègre désormais la qualité de vie (QoL) et le contrôle des symptômes. L’hétérogénéité biologique du mCRPC, marquée par une complexité génomique croissante, appelle à une approche personnalisée reposant sur des biomarqueurs pour guider les choix thérapeutiques. Cette revue fait le point sur les traitements actuels, les innovations ciblées et les enjeux cliniques à venir.


Traitements standards et nouvelles associations ciblées : Vers une approche guidée par les biomarqueurs


La chimiothérapie reste un pilier : le docétaxel, standard de première ligne, prolonge la survie (OS médiane : 19,2 mois vs 16,3 mois, p < 0,004). En cas de progression, le cabazitaxel améliore également l’OS (15,1 vs 12,7 mois) avec des bénéfices sur la douleur et la réponse PSA. Toutefois, la toxicité hématologique importante limite parfois leur utilisation.


Les inhibiteurs du récepteur aux androgènes (ARSI) comme enzalutamide et abiratérone ont démontré leur efficacité en pré- et post-docétaxel. L’étude PREVAIL a montré une amélioration significative de la survie (32,4 vs 30,2 mois) et de la PFS radiologique (65 % à 12 mois). Ces agents sont mieux tolérés, mais exposent à des effets secondaires tels que fatigue, hypertension ou troubles métaboliques.


Les thérapies ciblées gagnent en importance avec l’essor de l’oncologie de précision. Environ 20 % des mCRPC présentent des anomalies de réparation de l’ADN (HRR), notamment les mutations BRCA1/2, sensibles aux inhibiteurs de PARP (PARPi). L’essai PROfound a démontré une amélioration de la PFS (7,4 vs 3,6 mois, HR 0,34) et de l’OS (18,5 vs 15,1 mois) avec olaparib chez les patients BRCA1/2 ou ATM mutants.


Plusieurs essais (PROpel, MAGNITUDE, TALAPRO-2) ont évalué des associations PARPi/ARSI. L’étude PROpel, sans sélection biomoléculaire préalable, a montré une amélioration de la PFS (24,8 vs 16,6 mois) avec olaparib + abiratérone, notamment chez les patients BRCA mutants (HR 0,29). Cependant, la toxicité (anémie, fatigue) reste une limite.



Vers des thérapies plus personnalisées : nouvelles cibles, immunothérapie et theranostics  


La voie PI3K/AKT/mTOR, activée en cas de perte du gène PTEN (40–60 % des mCRPC), constitue une cible prometteuse. L’essai IPATential150 a montré un bénéfice de la combinaison ipatasertib + abiratérone sur la PFS chez les patients PTEN- (HR 0,65).


En revanche, l’immunothérapie n’a pas encore démontré de bénéfice significatif dans cette population. Les essais KEYNOTE-199 et KEYLYNK-010 ont été négatifs chez les patients non sélectionnés. La faible expression de PD-L1 et l’environnement tumoral "froid" expliquent cette résistance.


Les approches theranostiques progressent rapidement avec le Lutétium-177-PSMA. L’essai VISION a montré une amélioration de la PFS (8,7 vs 5,1 mois) et de la QoL (FACT-P : 9,7 vs 2,4 mois) avec une tolérance acceptable. L’essai PSMAfore, en situation pré-taxane, confirme ces résultats (rPFS : 12,0 vs 5,6 mois, HR 0,43).


Vers une séquence thérapeutique guidée par les biomarqueurs


Le traitement du mCRPC a considérablement évolué avec l’intégration des PARPi, des inhibiteurs de l’AKT, et du Lutétium-177, en complément des ARSI et taxanes. Toutefois, le séquençage optimal des traitements et leur combinaison restent à définir. L’intégration systématique de tests génomiques (HRR, PTEN, ctDNA) permettra de mieux stratifier les patients et d’optimiser les résultats cliniques tout en préservant la QoL.

À lire également : Darolutamide : Va-t-il redéfinir la stratégie initiale dans le cancer de la prostate métastatique ?



À 
propos de l'auteure – Lila Rouland
Docteure en cancérologie, spécialisée en biotechnologies et marketing

Forte d’une double compétence scientifique et marketing, Lila met son expertise au service de l’innovation en santé. Après 5 années en recherche académique internationale, elle s’est tournée vers l’information médicale et scientifique en industrie pharmaceutique. Aujourd’hui rédactrice-conceptrice, elle s’attache à valoriser les savoirs scientifiques et à les transmettre avec clarté et pertinence aux professionnels de santé.



Source(s) :
Metastatic Castration Resistant Prostate Cancer: Advances in Treatment and Symptom Management. Kulasegaran T, Oliveira N Current Treatment Options in Oncology. 2024;25:914–931. ;

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