24/10/2025
ctDNA : promesse de précision ou miroir des inégalités ?
Oncologie
Le cancer du sein est la tumeur la plus fréquente chez la femme dans le monde. Malgré les progrès thérapeutiques, une part importante des patientes traitées reste à risque de rechute, notamment celles qui conservent une maladie résiduelle après un traitement néoadjuvant. Cette maladie résiduelle est un facteur pronostique majeur de récidive précoce, en particulier dans les sous-types agressifs comme le cancer du sein triple-négatif ou HER2+. La détection précoce de cette maladie résiduelle ou de la rechute imminente représente un enjeu crucial pour améliorer la prise en charge personnalisée et la survie globale.
Dans ce contexte, le ctDNA (ADN tumoral circulant) s’impose comme un outil prometteur de surveillance moléculaire. Il permettrait de détecter des traces de maladie avant toute manifestation clinique ou radiologique, et d’adapter précocement les stratégies thérapeutiques. Cependant, l’accès à cette technologie innovante reste profondément inégal, tant sur le plan géographique que socio-économique. Les populations issues de milieux ruraux ou vivant dans des pays à revenu faible ou intermédiaire sont moins incluses dans les essais, moins testées, et moins susceptibles de bénéficier de thérapies ciblées basées sur le ctDNA.
Cette étude a été initiée de sorte à analyser les inégalités d’accès, d’utilisation et de représentation autour du ctDNA dans le cancer du sein, afin de proposer des pistes concrètes pour une médecine de précision plus équitable.
Le ctDNA est-il vraiment pour toutes ?
L’étude révèle plusieurs couches d’inégalités. Sur le plan biologique, certaines populations présentent des profils génétiques distincts (mutations TP53 fréquentes, altérations CCND2, etc.), ce qui peut influencer la libération ou la détection du ctDNA. D’un point de vue structurel, des inégalités persistantes dans l’accès à la biologie moléculaire (coût, assurance, géographie) freinent l’utilisation des tests. En pratique clinique, les femmes noires reçoivent moins souvent des thérapies ciblées malgré des altérations identifiées. De plus, elles sont largement absentes des essais cliniques utilisant le ctDNA, limitant la généralisabilité des résultats. Enfin, dans les pays à revenu faible ou intermédiaire (Ghana, Inde, Chine), des études pilotes montrent que le ctDNA est techniquement faisable mais confronté à des obstacles d’infrastructure.
Pas de médecine de précision sans équité
Le cancer du sein, première cause de cancer chez la femme, reste marqué par un risque de rechute significatif, notamment chez les patientes avec maladie résiduelle après traitement initial. Le principal challenge réside dans la détection précoce de ces rechutes potentielles, par des outils sensibles, accessibles et validés, sans aggraver les inégalités existantes.
Cette étude visait à évaluer les usages, performances et limites du ctDNA en oncologie mammaire, tout en mettant en lumière les disparités structurelles et biologiques affectant son déploiement. Elle souligne que le ctDNA représente une avancée majeure, mais encore inégalement déployée, avec un risque de renforcer les écarts de prise en charge si des mesures correctives ne sont pas mises en place.
Les limites résident dans le manque de données robustes issues de populations non-blanches ou vivant en PRFI, ainsi que dans l’absence de standards universels pour l’interprétation des résultats. Les perspectives incluent le développement d’essais cliniques plus inclusifs, la décentralisation des plateformes de biologie moléculaire, la standardisation des seuils de détection selon les profils génétiques, et l’intégration du ctDNA dans une vision globale de médecine de précision équitable.
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About the author – Ana Espino
Source(s) :
Aronson, J., et al. (2025). Bridging the gap: ctDNA, genomics, and equity in breast cancer care. NPJ breast cancer, 11(1), 92 ;
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