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03/10/2025

Peut-on vraiment prédire la rechute après chirurgie du sein ?

Oncologie

Par Ana Espino | Publié le 3 octobre 2025| 3 min de lecture


#OctobreRose #CancerSein #IBTR #Récidive



La récidive tumorale ipsilatérale (IBTR) après chirurgie conservatrice dans le cancer du sein invasif constitue une préoccupation majeure en pratique clinique, tant sur le plan oncologique que psychologique. Si les progrès thérapeutiques ont permis de réduire ce risque, il persiste pour certaines patientes, avec des conséquences importantes sur la qualité de vie et la prise en charge ultérieure.


Les outils de prédiction actuellement disponibles sont souvent anciens, limités dans leur précision, et ne tiennent pas compte des données thérapeutiques modernes, comme l'utilisation large des traitements adjuvants (radiothérapie, hormonothérapie, anti-HER2). Dans un contexte de médecine personnalisée, il devient crucial de stratifier le risque de rechute locale afin d’ajuster l’intensité des traitements post-opératoires et d’éviter à la fois le surtraitement et le sous-traitement.


Cette étude a été initiée de sorte à développer puis valider un outil de prédiction du risque de rechute locale à 5 et 10 ans. L’objectif était de concevoir un modèle actualisé, cliniquement pertinent et facilement utilisable, fondé sur des variables standardisées (âge, statut tumoral, traitements reçus), capable de guider la prise de décision partagée en post-opératoire.



Qui rechute… et quand ?


8 938 patientes
ayant reçu une chirurgie mammaire conservatrice pour cancer invasif du sein, avec un suivi médian de 6,5 ans, ont été sélectionnées et intégrées à l’étude. Le modèle de régression de Cox développé intègre dix variables cliniques clés, dont l’âge, le grade tumoral, le statut des marges chirurgicales, la présence d’invasion lympho
vasculaire, le statut HER2, et les traitements adjuvants (radiothérapie, hormonothérapie, thérapies anti-HER2). Le modèle présente une calibration solide, avec une bonne concordance entre le risque estimé et observé, en particulier pour les patientes à faible et moyen risque. Le C-index du modèle final est de 0,65, ce qui reste modéré en termes de discrimination, mais acceptable en contexte populationnel.


Les patientes les plus à risque sont les jeunes femmes (< 40 ans), celles avec des marges positives ou étroites, et celles ayant une invasion lymphovasculaire. À l’inverse, l’association d’un traitement adjuvant complet (radiothérapie + hormonothérapie) est liée à un risque significativement réduit.


Un outil de plus vers une chirurgie sur-mesure


La rechute tumorale locale après chirurgie conservatrice du sein représente une complication redoutée, pouvant compromettre le pronostic et altérer la qualité de vie des patientes. L’un des principaux challenges actuels est d’estimer ce risque de manière personnalisée, afin d’adapter les traitements adjuvants sans basculer dans un sur- ou sous-traitement.


L’objectif de cette étude était de développer un modèle prédictif fiable de récidive ipsilatérale à 5 et 10 ans, fondé sur des données contemporaines et cliniquement accessibles. Le modèle proposé, bien calibré et intégré dans un outil interactif gratuit, constitue une avancée concrète vers une prise de décision plus individualisée en chirurgie mammaire.


Cependant, la capacité discriminante du modèle reste modérée, et l’analyse repose exclusivement sur une cohorte japonaise, ce qui limite sa généralisabilité. Par ailleurs, les données moléculaires et génomiques n’y sont pas encore intégrées. Des travaux supplémentaires impliquent une validation internationale, l’enrichissement du modèle par des biomarqueurs tumoraux, et l’étude de son impact réel sur les décisions cliniques et la satisfaction des patientes. Ce type d’outil pourrait devenir une pièce maîtresse de la médecine personnalisée dans le cancer du sein localisé.
 

À lire également : CDK4/6 : l’arme double tranchant ?



À propos de l'auteure – Ana Espino
Docteure en immunologie, spécialisée en virologie

Rédactrice scientifique, Ana est animée par la volonté de relier la recherche à l’impact concret. Spécialiste en immunologie, virologie, oncologie et études cliniques, elle s’attache à rendre la science complexe claire et accessible. Sa mission : accélérer le partage des savoirs et favoriser des décisions éclairées grâce à une communication percutante.



Source(s) :
Sagara, Y., et al. (2025). Development and Validation of an Ipsilateral Breast Tumor Recurrence Risk Estimation Tool Incorporating Real-World Data and Evidence From Meta-Analyses: A Retrospective Multicenter Cohort Study. JCO clinical cancer informatics, ;

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