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03/10/2025

Cancer du sein : et si la clé se trouvait dans notre assiette et nos bactéries ?

Oncologie

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Le cancer du sein (CS) reste le cancer le plus fréquent chez les femmes dans le monde et l’une des principales causes de mortalité. Son incidence croissante est liée non seulement aux facteurs génétiques et hormonaux, mais aussi à des éléments de mode de vie modifiables comme l’alimentation, l’obésité et la sédentarité. Cette revue explore comment la nutrition et la modulation du microbiote intestinal peuvent contribuer à la prévention, au traitement et à la survie après un CS, en mettant en lumière l’importance croissante de l’axe nutrition–microbiome.


Microbiote : le nouvel acteur clé du cancer du sein  


Le microbiote intestinal, composé de trillions de micro-organismes, influence la digestion, l’immunité, le métabolisme des hormones et l’inflammation systémique. La dysbiose, déséquilibre des communautés microbiennes — est impliquée dans l’obésité, le diabète et divers cancers, dont le CS. Des bactéries intestinales régulent par exemple le métabolisme des estrogènes via la β-glucuronidase, qui réactive ces hormones et peut favoriser les cancers hormono-dépendants. Par ailleurs, certains microbes produisent des acides gras à chaîne courte (AGCC), aux effets anti-inflammatoires et antitumoraux.

Chez les patientes atteintes de CS, on observe une diversité microbienne réduite et une composition distincte. Des espèces pathogènes comme Fusobacterium nucleatum et Bacteroides fragilis favorisent la croissance tumorale et les métastases, tandis que des bactéries bénéfiques (Lactobacillus, Bifidobacterium) exercent des effets protecteurs en renforçant la barrière épithéliale, en régulant l’immunité et en induisant l’apoptose des cellules tumorales. Des recherches récentes suggèrent également l’existence d’un microbiome spécifique au tissu mammaire, pouvant influencer directement le microenvironnement tumoral.


Stratégies alimentaires : nourrir la santé, affamer la tumeur


Les habitudes alimentaires influencent fortement à la fois le risque de CS et la composition du microbiote.  

  • Régime méditerranéen (MD) : basé sur les fruits, légumes, légumineuses, poissons et huile d’olive, il réduit le risque de mortalité de 13 % et améliore la survie à 15 ans (63,1 % vs 53,6 %). Le MD favorise également une diversité microbienne accrue et la présence de bactéries bénéfiques comme Bifidobacterium et Faecalibacterium prausnitzii.
  • Régime cétogène (RC) : pauvre en glucides, riche en graisses. Il limite le glucose dont dépendent les cellules tumorales (effet Warburg). Des études animales et cliniques montrent une diminution de la taille des tumeurs et une amélioration de la réponse à la chimiothérapie. Chez l’humain, il a été associé à une diminution de l’insuline sérique et du volume tumoral, avec une baisse notable du stade de la maladie dans certains cas. Toutefois, il réduit la diversité microbienne et la production d’AGCC.
  • Régimes à base de plantes : riches en fibres et en phytochimiques (polyphénols, phytoestrogènes). Ils sont liés à une baisse de 15 à 20 % de la mortalité par cancer et régulent des voies tumorales clés comme NF-κB et la signalisation estrogénique. Ils augmentent la présence de bactéries bénéfiques et d’AGCC.
  • Régime DASH : conçu contre l’hypertension, il diminue aussi le risque de CS, notamment chez les femmes préménopausées. Riche en fibres et antioxydants, il réduit la réabsorption d’estrogènes et favorise un microbiote protecteur.


Ces molécules cachées dans nos assiettes qui défient le cancer


Plusieurs composés alimentaires présentent des effets anticancéreux :

Isoflavones de soja (génistéine, daidzéine) : phytoestrogènes qui se lient préférentiellement aux récepteurs ERβ, limitant la prolifération cellulaire. Une consommation précoce (enfance/adolescence) est la plus protectrice. Le soja peut renforcer l’efficacité du tamoxifène et stimuler la croissance de probiotiques.
Sulforaphane (brocoli, chou) : puissant antioxydant et régulateur épigénétique, il favorise l’apoptose, réduit la taille tumorale et améliore l’action de la chimiothérapie. Il augmente les Lactobacillus intestinaux.
Polyphénols du thé vert (EGCG) : aux effets antioxydants, anti-angiogéniques et pro-apoptotiques. Associés à une baisse du risque de récidive et à une synergie avec le tamoxifène.
Curcumine (curcuma) : inhibe NF-κB, STAT3 et HER2, réduisant la prolifération et les métastases. Elle favorise aussi les bactéries bénéfiques (Bifidobacterium, Lactobacillus) ·         Resvératrol (raisin, vin rouge) : anti-inflammatoire et antioxydant, il module l’apoptose et interfère avec les cancers estrogéno-dépendants. Le microbiote transforme le resvératrol en métabolites bioactifs à potentiel anticancéreux
 

Conclusion & perspectives  


La nutrition et la modulation du microbiome apparaissent comme des leviers complémentaires et non toxiques dans la lutte contre le cancer du sein. Associées aux thérapies classiques, ces approches pourraient renforcer l’efficacité des traitements, limiter les récidives et améliorer la qualité de vie. Reste désormais à confirmer ces promesses par des essais cliniques de grande ampleur pour ouvrir la voie à une prise en charge plus personnalisée et intégrative.



Source(s) :
Jiang, Y. & Li, Y. Nutrition Intervention and Microbiome Modulation in the Management of Breast Cancer. Nutrients 2024, 16 (16), 2644. ;

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