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03/10/2025

Transformer ses habitudes de vie pendant la chimiothérapie : enseignements de l’essai LEANer

Oncologie

Par Lila Rouland | Publié le 3 octobre 2025 | 2 min de lecture


#CancerSein#Exercice#chimiothérapie



L’essai Lifestyle, Exercise, and Nutrition Early After Diagnosis (LEANer) a évalué si une intervention structurée sur le mode de vie pouvait améliorer l’activité physique (AP) et la qualité de l’alimentation chez des femmes recevant une chimiothérapie pour un cancer du sein. Alors que la plupart des études se concentrent sur la période post-traitement, cet essai a été mis en place dès le début de la chimiothérapie, une phase marquée par de nombreux défis physiques et psychosociaux qui tendent à réduire l’AP et la qualité alimentaire.


Conception de l’étude et participantes


Cet essai randomisé contrôlé a recruté 173 femmes atteintes d’un cancer du sein de stade I à III débutant une chimiothérapie. Les participantes ont été assignées soit à une intervention d’un an en nutrition et exercice (n=87), soit aux soins habituels (UC, n=86). Les critères d’éligibilité comprenaient un niveau initial d’AP insuffisant (<150 minutes/semaine) et une consommation de fruits et légumes inférieure à 7 portions/jour. Les femmes déjà engagées dans une chimiothérapie avancée ou présentant des comorbidités sévères étaient exclues.


L’intervention comportait 16 séances de conseil individuel assurées par des diététiciennes spécialisées en oncologie, en présentiel, par téléphone ou visioconférence (selon les restrictions liées à la COVID-19). Ces séances se sont échelonnées sur un an : hebdomadaires le premier mois, bimensuelles aux mois deux et trois, puis mensuelles. Les objectifs étaient d’atteindre 150 minutes/semaine d’exercice modéré, deux séances de musculation par semaine, et une alimentation majoritairement végétale conforme aux recommandations pour les survivants du cancer. Les femmes du groupe UC ont reçu les ressources de suivi après l’étude.



Bouger, se renforcer, mieux s’alimenter : les preuves


Les principaux critères étaient : minutes d’AP par semaine, participation à la musculation, et qualité alimentaire évaluée par l’Healthy Eating Index-2015 (HEI-2015). Des données sociodémographiques, cliniques et auto-déclarées (fatigue, dépression, fonction physique) ont aussi été recueillies.


Adhésion
: Les participantes ont montré un fort engagement, assistant en moyenne à 15 séances sur 16. Le taux de rétention dépassait 85 % à un an.


Activité physique
: À l’inclusion, les femmes ne pratiquaient que 24 minutes/semaine en moyenne. Après un an, le groupe intervention réalisait 136 minutes/semaine de plus que l’UC (p<0,001). 76 % ont atteint les recommandations d’AP, contre 24 % dans l’UC.


Musculation
: Après un an, 56 % des participantes de l’intervention pratiquaient la musculation contre 15 % dans l’UC (p<0,001).


Qualité alimentaire :
Le score HEI-2015 de base était de 66,9. L’amélioration dans le groupe intervention a été modeste (+2,5 points) et non significative (p=0,08). Toutefois, on a observé des gains dans la consommation de fruits/légumes et la réduction du sucre ajouté, malgré les effets secondaires fréquents de la chimiothérapie (nausées, perte d’appétit).



Pourquoi certaines femmes réussissent mieux ?


  • Fatigue initiale faible : meilleure progression de l’AP (p=0,04).
  • Niveau d’éducation élevé : amélioration plus marquée de la qualité alimentaire (p=0,001).
  • Qualité alimentaire initiale élevée et vie en couple : plus grande probabilité de pratiquer la musculation (OR=2,56 et OR=2,87).

Ces résultats suggèrent que les caractéristiques individuelles et le soutien social influencent la réussite des changements de mode de vie.


L’enseignement majeur de l’essai LEANer


L’essai démontre que des améliorations significatives de l’AP et de la musculation sont possibles dès le début de la chimiothérapie, contrairement à la tendance habituelle de baisse de l’activité. Bien que les progrès alimentaires soient plus limités, le maintien d’une alimentation de meilleure qualité pendant le traitement est encourageant.


Les sous-groupes les plus susceptibles de réussir étaient les femmes moins fatiguées, plus instruites, avec une alimentation déjà saine et bénéficiant d’un soutien social. Ces données permettront de mieux cibler et adapter les futures interventions.

En conclusion, le LEANer trial apporte des preuves solides qu’une intervention précoce, dès le début de la chimiothérapie, peut améliorer durablement l’activité physique et soutenir de meilleures habitudes alimentaires chez les femmes atteintes de cancer du sein. 

À lire également : Moins de poids, moins d’œdème ?



À propos de l'auteure – Lila Rouland
Docteure en cancérologie, spécialisée en biotechnologies et marketing

Forte d’une double compétence scientifique et marketing, Lila met son expertise au service de l’innovation en santé. Après 5 années en recherche académique internationale, elle s’est tournée vers l’information médicale et scientifique en industrie pharmaceutique. Aujourd’hui rédactrice-conceptrice, elle s’attache à valoriser les savoirs scientifiques et à les transmettre avec clarté et pertinence aux professionnels de santé.



Source(s) :
Puklin LS, Ferrucci LM, Harrigan M et al. (2024) Improving Lifestyle Behaviors During Chemotherapy for Breast Cancer: The Lifestyle, Exercise, and Nutrition Early After Diagnosis (LEANer) Trial. Cancer. Jul 15;130(14):2440–2452. doi:10.1002/cncr.35280 ;

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