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06/08/2025

Fibrinogène précoce : une perf' qui peut sauver ?

Cardiologie et Médecine Vasculaire

Par Ana Espino | Publié le 06 Août 2025| 2 min de lecture


#Fibrinogène #Hémorragie #Coagulopathie



L’hémorragie traumatique est une cause majeure de mortalité évitable chez les patients victimes de traumatismes graves, en particulier dans les premières heures suivant la blessure. Elle est souvent aggravée par une coagulopathie aiguë, qui survient dès les premières minutes du traumatisme et contribue à l’aggravation du saignement. Parmi les anomalies précoces observées, le déficit en fibrinogène est l’un des premiers facteurs altérés et représente un déterminant clé de la stabilité du caillot.


Malgré les avancées dans les protocoles de transfusion massive, la place du fibrinogène reste encore mal définie. Les pratiques sont très variables d’un établissement à l’autre, tant sur le choix du produit que sur le timing d’administration, qui pourrait pourtant être déterminant. Certaines études suggèrent qu’une administration très précoce, dès la phase de réanimation initiale, pourrait limiter la décompensation hémodynamique, réduire les besoins transfusionnels, et améliorer la survie.


Cependant, les preuves cliniques directes sur ce sujet restent limitées, fragmentées et parfois contradictoires. Le principal challenge consiste à démontrer de manière robuste que l’administration précoce de fibrinogène améliore les résultats cliniques de façon significative et sans accroître les risques thromboemboliques.


Dans ce contexte, cette étude a été initiée de sorte à évaluer l'effet de l'administration précoce de fibrinogène sur la mortalité, les besoins transfusionnels et les événements indésirables, chez des patients victimes d’hémorragies traumatiques sévères.



Injecter tôt… pour sauver plus ?


Douze études ont été retenues, totalisant 1 657 patients adultes présentant une hémorragie traumatique sévère. Les participants ont été répartis selon la précocité de l’administration de fibrinogène, définie comme une intervention dans les trois premières heures suivant l’arrivée. L’efficacité du traitement a été en observant les variables de résultat suivantes : la mortalité à 24 heures, la mortalité hospitalière globale, les besoins en transfusion ainsi que la survenue d’événements thromboemboliques indésirables.


L’analyse révèle que l’administration précoce de fibrinogène est associée à une réduction significative de la mortalité à 24 heures, indiquant un bénéfice réel en phase aiguë. En revanche, aucune différence notable n’a été observée sur la mortalité hospitalière globale, suggérant que le bénéfice immédiat ne se traduit pas nécessairement par une amélioration du pronostic à long terme. On observe également une réduction modérée des besoins transfusionnels, ce qui pourrait limiter les complications liées aux transfusions massives. Aucune augmentation du risque thromboembolique n’a été constatée, renforçant le profil de sécurité du fibrinogène en phase aiguë. Toutefois, les résultats présentent une certaine hétérogénéité, liée à la variabilité des produits administrés et des protocoles utilisés entre les différents contextes d’étude.



Fibrinogène en urgence : un standard à venir ?


L’hémorragie traumatique est l’une des principales causes de décès évitables en urgence, aggravée par une coagulopathie aiguë, notamment un déficit précoce en fibrinogène. Le principal défi de cette pathologie réside dans l’intervention à temps pour corriger ce déficit, en optimisant la prise en charge hémostatique dès les premières heures.


L’objectif de cette revue était d’évaluer l’efficacité d’une administration précoce de fibrinogène sur la mortalité et les besoins transfusionnels chez les patients victimes de traumatismes hémorragiques. Les résultats suggèrent un bénéfice réel sur la mortalité à 24 heures et une réduction modérée des transfusions, sans augmentation des risques thromboemboliques. En revanche, l’effet sur la mortalité hospitalière globale reste incertain, et l’hétérogénéité des protocoles limite la portée des conclusions.


Pour aller plus loin, des essais prospectifs de grande ampleur sont nécessaires afin de standardiser les pratiques, d’identifier les patients qui bénéficieraient le plus de cette stratégie, et de valider le fibrinogène comme intervention précoce de référence dans les protocoles de gestion de l’hémorragie traumatique.
   

À lire également : COVID-19 et paramètres de coagulation : un lien avec la mortalité ?




À propos de l'auteure – Ana Espino
Docteure en immunologie, spécialisée en virologie

Rédactrice scientifique, Ana est animée par la volonté de relier la recherche à l’impact concret. Spécialiste en immunologie, virologie, oncologie et études cliniques, elle s’attache à rendre la science complexe claire et accessible. Sa mission : accélérer le partage des savoirs et favoriser des décisions éclairées grâce à une communication percutante.




Source(s) :
Burt, T., et al. (2025). Effect of early administration of fibrinogen replacement therapy in traumatic haemorrhage: a systematic review […] of randomised controlled trials with narrative synthesis of observational studies. Critical care (London) 29(1), 49 ;

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