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26/05/2025

Parkinson : et si tout partait de l’intestin ?

Gastro-entérologie et Hépatologie Neurologie

#Parkinson #Microbiote #Dysbiose #Neurogastroentérologie #SantéIntestinale #Neuroinflammation  


La maladie de Parkinson (MP) est une affection neurodégénérative progressive qui touche environ 1% des personnes âgées de plus de 60 ans. Elle se manifeste par des symptômes moteurs tels que les tremblements de repos, la rigidité musculaire, la lenteur des mouvements et les troubles posturaux. Toutefois, des symptômes non moteurs, comme la constipation, les troubles du sommeil, de l’humeur ou cognitifs, suggèrent une implication plus large que le seul système nerveux central. Ces observations ont conduit à proposer une origine intestinale de la maladie.

Face à cet intérêt croissant, de nombreuses études ont exploré la relation entre le microbiote et la maladie de Parkinson. En effet, le microbiote joue un rôle fondamental dans de nombreuses fonctions physiologiques, notamment la régulation immunitaire, la production de neurotransmetteurs, la perméabilité intestinale et la synthèse de métabolites à effets neuroprotecteurs comme les acides gras à chaîne courte et les polyamines. Dans la maladie de Parkinson, des altérations de la composition du microbiote pourraient contribuer à l’inflammation intestinale, à une perméabilité accrue de la barrière épithéliale, et à l’initiation ou l’aggravation de la neurodégénérescence. Toutefois, les résultats actuels présentent une forte variabilité selon les populations étudiées. Cette hétérogénéité s’explique notamment par des facteurs géographiques, alimentaires, génétiques et méthodologiques, rendant difficile l’identification de signatures microbiennes cohérentes et reproductibles à l’échelle internationale.
 

Dans ce contexte, cette étude a été initiée afin d’éclairer le rôle du microbiote intestinal dans la pathogenèse de la maladie de Parkinson et d’identifier des pistes thérapeutiques ciblées fondées sur les altérations microbiennes communes observées à l’échelle internationale.
   


Le microbiote, complice silencieux de Parkinson ?


Dans cette étude, des échantillons fécaux de patients atteints de la maladie de Parkinson, ont été comparés à ceux de témoins sains. La technique de séquençage métagénomique de type shotgun a été employée, afin de caractériser la composition bactérienne et fonctionnelle du microbiote intestinal. Les concentrations fécales d’acides gras à chaîne courte et de polyamines, deux familles de métabolites clés dans la santé intestinale et neuronale, ont également été étudiées.

L’analyse a révélé une diversité α significativement plus élevée chez les patients atteints de la maladie de Parkinson, traduisant une plus grande richesse et homogénéité dans la répartition des espèces bactériennes. Cette augmentation de diversité suggère une réorganisation profonde du microbiote intestinal dans la MP.


Sur le plan taxonomique, certaines espèces bactériennes ont montré des variations notables. Akkermansia muciniphila, une bactérie mucinolytique, était significativement plus abondante chez les patients, tandis que Roseburia intestinalis et Faecalibacterium prausnitzii, deux espèces reconnues pour leur capacité à produire du butyrate, étaient fortement diminuées. Ces altérations confirment une dysbiose centrée sur la réduction des bactéries bénéfiques et une possible atteinte de la barrière muqueuse intestinale.


Les analyses fonctionnelles ont mis en évidence une réduction marquée des gènes bactériens impliqués dans la biosynthèse de la riboflavine (vitamine B2) et la biotine (vitamine B7). Parallèlement, cinq des six grandes familles d’enzymes actives sur les glucides, impliquées dans la dégradation des polysaccharides alimentaires, étaient significativement diminuées, suggérant un affaiblissement global du métabolisme bactérien des fibres alimentaires.


Sur le plan métabolique, les concentrations fécales d’acides gras étaient nettement réduites chez les patients, tout comme celles des polyamines putrescine, spermidine et spermine. Ces molécules jouent un rôle essentiel dans le maintien de l’intégrité épithéliale, la modulation immunitaire et la protection neuronale.


Enfin, des corrélations positives ont été observées entre l’abondance des gènes bactériens de biosynthèse de la riboflavine et de la biotine, et les niveaux fécaux d’acides gras et de polyamines. Ce lien suggère l’existence d’une signature métabolique commune caractérisée par une perte fonctionnelle du microbiote dans la MP, reliant directement les déficits microbiens à des altérations biochimiques ayant potentiellement un impact sur la neuroinflammation et la progression de la maladie.
 

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Une piste bactérienne à suivre ?


La maladie de Parkinson est une pathologie neurodégénérative complexe, dont l’implication du microbiote intestinal dans sa progression est de plus en plus reconnue. L’un des principaux défis réside dans la forte variabilité géographique de la composition microbienne, ainsi que dans l’hétérogénéité des espèces bactériennes responsables des altérations fonctionnelles, qui complique l’identification de cibles communes. Dans cette optique, cette étude a été conçue afin d’identifier des altérations microbiennes fonctionnelles partagées, en lien avec des déséquilibres métaboliques intestinaux spécifiques à la pathologie.


Les résultats mettent en évidence une dysbiose caractéristique, associée à une réduction de la biosynthèse de la riboflavine et de la biotine, et à une diminution des SCFAs et des polyamines fécaux, tous essentiels au maintien de l’intégrité intestinale et à la régulation neuro-immunitaire. Ces altérations suggèrent un rôle actif du microbiote dans l’amplification des mécanismes pathologiques intestinaux et neuronaux de la maladie.

Les données obtenues offrent des perspectives thérapeutiques prometteuses. La supplementation en riboflavine et biotine pourrait représenter une stratégie ciblée pour compenser les déficits fonctionnels du microbiote. De plus, le renforcement de la barrière intestinale par modulation du microbiote pourrait contribuer à freiner la propagation des agrégats d’α-synucléine et à limiter l’inflammation neurogène, deux mécanismes centraux dans la progression de la maladie de Parkinson.

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Source(s) :
Nishiwaki, H., et al. (2024). Meta-analysis of shotgun sequencing of gut microbiota in Parkinson’s disease. npj Parkinson's Disease, 10(1), 106 ;

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