30/07/2025
Pancréas + HCV : pari risqué ou nouvelle donne ?
Gastro-entérologie et Hépatologie Infectiologie
#HCV #Hépatite #Pancréas
La transplantation pancréatique reste une solution efficace chez les patients atteints de diabète de type 1 sévère, mais le nombre de greffons disponibles demeure insuffisant. Face à cette pénurie, les greffons issus de donneurs infectés par le virus de l’hépatite C (HCV) représentent une ressource sous-utilisée. Historiquement, la transmission du virus au receveur séronégatif (D+/R−) était rédhibitoire, du fait du risque infectieux et des limites des traitements de l’époque (interféron ± ribavirine). L’introduction des antiviraux à action directe (DAA), efficaces sur tous les génotypes et bien tolérés, a modifié cette perception. Dans les transplantations hépatiques et rénales, les résultats des greffes D+/R− sous DAA sont très encourageants. En revanche, les données sur la transplantation pancréatique D+/R− restent rares.
Dans ce contexte, cette étude a été initiée de sorte à explorer les données cliniques disponibles sur la transplantation pancréatique à partir de donneurs HCV-virémiques vers des receveurs séronégatifs, et évaluer l’efficacité des schémas prophylactiques ou réactifs de traitement par DAA.
Greffer un pancréas infecté… et si c’était sans danger ?
Sept études publiées entre 2020 et 2025 ont été analysées, regroupant 22 patients ayant reçu une greffe pancréatique à partir de donneurs HCV-virémiques vers des receveurs séronégatifs (D+/R−), seule ou en association avec une greffe rénale. Les patients ont reçu divers protocoles d'antiviraux à action directe (DAA), administrés soit à titre prophylactique — avant ou immédiatement après la transplantation —, soit de manière réactive, après confirmation de l'infection virale.
Les résultats des études sont particulièrement encourageants. Tous les patients ont obtenu une réponse virologique soutenue à 12 semaines (SVR12), quel que soit le schéma antiviral utilisé. La fonction des greffons, qu’ils soient pancréatiques ou rénaux, a été conservée, sans aucun cas de rejet pancréatique aigu signalé. Les traitements par DAA ont été bien tolérés, y compris chez des patients sous forte immunosuppression. Les protocoles prophylactiques de courte durée (7 à 8 jours) se sont révélés aussi efficaces que les stratégies réactives classiques de 12 semaines. Un seul cas d’échec virologique initial a été rapporté, lié à un schéma thérapeutique inadapté au génotype viral, corrigé avec succès par une reprise du traitement sur 16 semaines.
Et si le virus ouvrait des portes ?
La transplantation pancréatique est une option thérapeutique efficace mais limitée par la pénurie de greffons. L’utilisation de pancréas issus de donneurs HCV-viremiques, autrefois exclue, devient aujourd’hui envisageable grâce aux antiviraux à action directe.
Le principal défi consiste à sécuriser cette approche chez des receveurs séronégatifs, en définissant des protocoles antiviraux adaptés et un suivi post-greffe rigoureux.
Cette revue montre que les greffes pancréatiques D+/R−, accompagnées d’un traitement antiviral bien conduit, permettent une éradication complète du virus tout en préservant la fonction du greffon, sans complications majeures.
Les résultats sont très prometteurs. À terme, l’intégration des greffons HCV-positifs dans la pratique clinique pourrait réduire significativement les délais d’attente. Cela implique toutefois l’élaboration de recommandations claires, une sélection adaptée des patients et une approche individualisée selon le statut virologique et immunitaire.
À lire également : Hépatite C : 5 minutes chrono pour tester juste ?
À propos de l'auteure – Ana Espino
Docteure en immunologie, spécialisée en virologie

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