Précédent Suivant

31/07/2025

L’autre visage silencieux des maladies auto-immunes hépatiques

Infectiologie

Par Ana Espino | Publié le 31 juillet 2025 | 3 min de lecture


#Hépatite #Immunité #AutoImmunité #FibroseHepatique


La fibrose hépatique est une complication commune, progressive et souvent silencieuse des maladies auto-immunes du foie (MAIH), notamment la cholangite biliaire primitive (CBP), l’hépatite auto-immune (HAI) et la cholangite sclérosante primitive (CSP). Ces pathologies se caractérisent par une inflammation chronique entraînant des lésions hépatiques, qui évoluent vers la fibrose, puis la cirrhose en l’absence de traitement efficace.


Le diagnostic et le suivi de la fibrose reposent encore souvent sur la biopsie hépatique, malgré ses limites : caractère invasif, variabilité inter-observateur et non-reproductibilité dans le temps. L’évaluation non invasive de la fibrose représente donc un enjeu majeur pour une prise en charge plus précise, plus sécurisée et mieux ciblée.


Le principal défi est de parvenir à prédire l’évolution de la fibrose sans recourir à des méthodes invasives, tout en identifiant les patients à haut risque nécessitant une intensification thérapeutique. Dans ce contexte, cette étude a été initiée de sorte à proposer une synthèse actualisée sur les mécanismes de la fibrose dans les MAIH, les outils non invasifs disponibles pour l’évaluer et les options thérapeutiques actuelles et émergentes.



Peut-on vraiment évaluer la fibrose sans biopsie ?


Pour ces travaux, les études cliniques et expérimentales récentes portant sur la fibrose hépatique dans les maladies auto-immunes du foie (CBP, HAI, CSP) ont été sélectionnées. L’analyse s’est articulée autour de trois axes : les mécanismes pathogéniques de la fibrose, les outils non invasifs d’évaluation (scores sériques, élastographie, biomarqueurs émergents) et l’impact des traitements sur la progression de la fibrose. Des données comparatives ont été utilisées pour évaluer la performance diagnostique et les réponses thérapeutiques selon le degré de fibrose.


Sur le plan physiopathologique, la fibrose résulte d’une activation chronique des cellules étoilées hépatiques et des fibroblastes portaux, sous l’effet persistant des cytokines pro-inflammatoires. Les profils moléculaires diffèrent selon la maladie : dans la CBP, la fibrose est souvent périportale ; dans la CSP, elle est plus concentrique et péribilaire ; dans l’HAI, elle est principalement lobulaire.


L’évaluation non invasive repose aujourd’hui sur plusieurs approches complémentaires. Les scores sériques (APRI, FIB-4, ELF) montrent une utilité modérée, mais leur performance reste limitée dans les MAIH. L’élastographie (FibroScan, ARFI, MRE) s’impose comme un outil de choix, particulièrement pour la CSP. Des biomarqueurs émergents comme les microARN, la calprotectine fécale ou les signatures transcriptomiques pourraient affiner la stratification du risque.


Côté thérapeutique, l'acide ursodésoxycholique reste la base dans la CBP et la CSP, bien qu'insuffisante chez un tiers des patients. Les agents de seconde ligne (acide obéticholique, fibrates, budésonide, immunosuppresseurs) sont en développement ou en cours d’approbation. L’objectif est désormais d’associer traitement de l’inflammation auto-immune et modulation directe de la fibrogenèse.

À lire également : Hépatites : quand le virus écrit ses propres règles


De l’aiguille au biomarqueur : une révolution en marche ?


Les maladies auto-immunes hépatiques sont associées à un risque élevé de fibrose silencieuse et progressive. Le défi actuel est double : détecter précocement la progression de la fibrose et adapter la stratégie thérapeutique sans recours systématique à la biopsie.


Cette revue met en lumière les avancées majeures dans la compréhension des mécanismes de fibrogenèse et l’émergence d’outils non invasifs fiables. Si l’élastographie s’impose déjà comme une alternative pertinente, l’avenir repose sur des approches intégratives combinant imagerie, biomarqueurs sériques et signatures moléculaires.


L’avenir de la prise en charge des fibroses dans les MAIH repose sur le développement d’une médecine de précision, fondée sur des outils non invasifs validés et des marqueurs dynamiques. Ces approches permettront un suivi plus fin de l’évolution de la fibrose et une adaptation précoce des traitements, en tenant compte de la diversité des profils cliniques et des réponses individuelles.

À lire également : HBV : Immunité en veille ou en réveil ?




À 
propos de l'auteure – Ana Espino
Docteure en immunologie, spécialisée en virologie

Rédactrice scientifique, Ana est animée par la volonté de relier la recherche à l’impact concret. Spécialiste en immunologie, virologie, oncologie et études cliniques, elle s’attache à rendre la science complexe claire et accessible. Sa mission : accélérer le partage des savoirs et favoriser des décisions éclairées grâce à une communication percutante.
 



Source(s) :
Lytvyak, E., et al. (2025). Pathogenesis, Non-Invasive Assessments and Treatment of Hepatic Fibrosis in Autoimmune Liver Diseases. Liver international : official journal of the International Association for the Study of the Liver, 45(8), e70190 ;

Dernières revues


Virus oncolytiques : les tumeurs solides ont-elles trouvé leur match ?

Par Ana Espino | Publié le 01 Août 2025| 2 min de...

HBV : protéger le foie… sans abîmer le reste ?

Par Ana Espino | Publié le 01 Août 2025| 3 min de...

L’autre visage silencieux des maladies auto-immunes hépatiques

Par Ana Espino | Publié le 31 juillet 2025 | 3 mi...